1639 à 1641/ La Révolte des va-nu-pieds

 

La révolte des va-nu-pieds (appelé ainsi parce qu'ils récoltent le sel pied nu) est un soulèvement populaire qui toucha la Normandie en 1639 à la suite de la décision de Louis XIII d’instaurer la gabelle dans le Cotentin à la place du privilège de quart-bouillon.

En janvier 1639, le gouvernement décide de supprimer le privilège de quart-bouillon dont bénéficiait le Cotentin. On faisait bouillir du sable salé : un quart de la production revenait au roi (qui le revendait avec taxe), les trois quarts restants étaient commercialisés par les producteurs (sans taxe). Désormais toute la production est soumise à la gabelle) et vendue exclusivement dans les greniers à sel royaux pour en faciliter le contrôle, ce qui triple le prix du sel.

 

Le pays jouissait du privilège du sel de la baie, et une telle décision menaçait les quelque 1 200 personnes qui vivaient des salines. 

 

Les troubles éclatent à Avranches le jour où un officier de police de Coutances est accueilli par des clameurs contre le « gabeleur, les monopolistes » : il est assommé par une foule déchaînée ; même sort est promis à quiconque voudrait introduire un nouvel impôt. 

En quelques semaines, l'agitation gagne toute la basse Normandie. Une armée de près de 20 000 hommes se lève dans les campagnes, encadrée par des gentilshommes et des prêtres. Ils disent avoir pour chef un certain Jean Va-Nu-Pieds, dont on a cherché en vain l'identité.

Des manifestes en vers incitent à la révolte la noblesse normande, les bourgeois et les rentiers contre les humiliations et les spoliations. Il est fait appel à l'insurrection jusqu'en Poitou, en Bretagne, à Paris.

Le peuple de Rouen se soulève pour s'opposer à un nouveau droit sur les étoffes teintes ; robins, fabricants, artisans se jettent dans la révolte. Le premier officier chargé d'appliquer l'édit sur les teintures est tué sur le parvis de la cathédrale ; les maisons des traitants sont pillées, le bureau des aides attaqué ; un horloger, Gorin, prétend être le lieutenant de Jean Va-Nu-Pieds et prend la tête de l'émeute. L'agitation règne à Caen et à Bayeux.

Des villageois subissent les violences des soudards lors du pillage de leur village. Tableau de Sébastien Vrancx (1573-1647) au Louvre.

Sur ordre de Richelieu qui veut faire un exemple, cette sédition est férocement réprimée par le colonel Jean de Gassion placé sous les ordres du chancelier Pierre Séguier.

Barnabé du Laurens de la Barre, sieur écuyer, président en l’Élection de Mortain prend activement part à la répression de ce soulèvement.

La révolte est finalement écrasée le 30 novembre 1639 à Avranches, les responsables sont jugés et les villes normandes perdent leurs privilèges.

Le châtiment s’abat sur Rouen où le chancelier Séguier s’établit à l’abbaye royale de Saint-Ouen, en 1640, loge ses soldats chez l’habitant, remplace la municipalité par une commission et interdit le Parlement. Quand il marche sur Caen, toute la Normandie est terrorisée.

Barnabé du Laurens de la Barre sera anobli en septembre 1654 par lettres patentes signées du roi Louis XIV.